the yogini filmmaker post 2

LES PROMESSES DU CO-

* * *

Tant de dimensions, d’éléments, de promesses contenues dans seulement deux petites lettres. CO-… un préfixe porteur d’aventures diverses et variées à deux ou plus, jamais seule en tout cas.

Collaboration, CO-création, CO-direction, CO-réalisation, CO-écriture, CO-loc, CO-opération…

La liste est longue ! Deux lettres qui se déclinent dans tous les domaines, de l’amour à la voiture en passant par le cinéma, le bureau et même le dodo (mes amis parents savent de quoi je parle…)

Je dois d’abord dire que dans une première phase, j’apprécie de travailler seule : pour développer une idée nouvelle, voir jusqu’où elle peut aller, tester sa viabilité mais très vite l’envie de partager prend le dessus, avec le désir irrésistible de confronter cette idée à d’autres regards, de l’enrichir d’autres points de vue. Ouvrir ses idées à l’autre, qu’il ou elle soit méticuleusement choisi(e) ou bien fasse partie d’une équipe déjà formée, implique d’affûter son sens de l’écoute et son ouverture d’esprit, l’envie d’apprendre et même de transgresser certaines barrières qui nous retiennent.

En ce moment, je suis dans une phase boulimique de Collaboration. J’ai déjà travaillé sur de nombreux projets en équipe ou en duo, que ce soit dans l’audiovisuel mais aussi dans le cadre de stages pour actrices/teurs et je développe actuellement une série de workshops de yoga à plusieurs voix et mains ! Je trouve une grande satisfaction à élaborer des formats et des collabs permettant un enrichissement, une complémentarité des savoirs pour offrir une prestation optimale à un groupe de gens désireux d’explorer et approfondir leur pratique de yoga ou d’acting.

Selon mon expérience à deux têtes -comme je l’expliquais dans mon premier post : Yoga ET Cinema , c’est sur un plateau de cinéma que le CO prend tout son sens. Qu’est ce qu’un film si ce n’est un subtil mélange de talents et de compétences artistiques, techniques et humaines qui se complètent les unes les autres pour donner vie à une vision commune ? Au tout début de la vie d’un film, on est seule avec une idée, les prémices d’une histoire, seule face à une feuille blanche qu’elle soit en papier ou en Word. Bien plus tard, seule souvent encore pour « pitcher » l’histoire à des amis, un parent bienveillant et peut être plus tard à une productrice/teur avec qui vous aurez décroché un rendez-vous (YESSS !). Si l’histoire poursuit sa bonne femme de route, plus le temps passe, plus le solo devient CO. Chaque personne avec qui vous partagez l’histoire va se l’approprier, venir apporter sa vision, ses opinions et idées. Chacun vient apporter sa pierre à l’édifice de l’histoire pour la rendre visuelle, musicale, afin de la partager un jour avec un public. Un film est une grande aventure collective dans laquelle chacun a un rôle principal à jouer.

Être deux, c’est mieux?

Pourtant, il peut aussi arriver que ce dicton ne se vérifie pas et que l’expérience s’avère douloureuse, voire traumatisante. Une CO-quoique-ce-soit implique d’avoir sérieusement réfléchi à la valeur que l’on place dans ce CO. Comme tout bon préfixe, celui-ci se place bien avant tout le reste ! Il s’agit d’un choix chargé de sens, impliquant respect, soutien et décisions mutuelles mais aussi partage d’une part d’intimité, en particulier dans le cadre des projets artistiques. Un film part souvent d’une histoire personnelle, de quelque chose faisant écho à une expérience, une faille, à un souvenir au fond de soi. On y met de sa personne et cela peut rendre vulnérable. C’est la raison pour laquelle une collaboration qui prend l’eau peut vite dégénérer.

Un couple artistique peut lui aussi subir un divorce et il est tout aussi douloureux. Il faut se séparer, partager les meubles et continuer sa route en solo (ou pas…). Il y a quelques années, j’ai vécu une expérience de ce type. Cet événement m’a marquée et il m’a fallu du temps pour m’en remettre. Ma déception a été à la mesure de mon engagement : ample et étendue. J’avais mis beaucoup d’énergie, de temps, de ressources et de cœur dans ce projet de film et voilà que mon partenaire avait trouvé mieux et plus facile ailleurs et me remerciait tout en non-dits afin de pouvoir continuer sa route avec un plus-offrant, tirant soudainement un trait sur tout ce que nous avions accompli/CO-créer, sabordant par la même occasion une amitié professionnelle de plusieurs années. Un crève-cœur.

Bien-sûr, chacun a ses raisons d’agir de telle ou telle façon, ses torts et ses justifications. La vérité se tient quelque part entre les deux versions. Mais bon…

Cette expérience malheureuse m’a fait beaucoup réfléchir. Qu’est ce que travailler ensemble signifiait pour moi ? Devais-je y mettre un terme une bonne fois pour toutes pour travailler seule et ne plus jamais être « em…dée » comme me disaient plusieurs voix de mon entourage. J’ai tout d’abord retourné la situation : qu’aurais-je fait si j’avais été à sa place et qu’on m’avait proposé de continuer sans lui ? Ma réponse était sans appel : j’avais déjà été dans cette situation par le passé et j’avais catégoriquement refusé de continuer un projet si mon collaborateur ne pouvait pas faire partie de l’aventure.

Ce NOUS représentait l’essence du projet et il était non négociable, même contre de l’argent, une exposition médiatique ou que sais-je encore.Le CO passe avant tout le reste ; il est le point de départ et la condition du voyage.

Cet échec m’a permis de renforcer mes valeurs. Un échec est avant tout un apprentissage. Il bouscule et questionne les fondations et fait évoluer d’une façon ou d’une autre. Alors je ne regrette rien. Et encore aujourd’hui, je chéris cette mise en commun et j’ai toujours autant soif de collaboration, de cet enrichissement mutuel. Le CO est une partie de moi et il contribue à rendre chaque projet plus enthousiasmant. Travailler ensemble, c’est aussi mieux se comprendre soi-même, accepter d’avoir tort ou partiellement raison. Voyons ce que le futur réserve avec tous ces projets sur le feu mais une chose est sûre, je suis toujours partante –encore plus dans ce contexte confiné et contraint -où le CON- a trop éclipsé le CO – à l’idée de me lancer dans une nouvelle co-aventure, qu’elle soit yogique ou cinématographique.